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n janvier 2009, la tempête Klaus dévaste le « Massif des Landes de Gascogne » (MLG), à pe ine dix ans après le passage de l’ouragan Martin (photo ). Suite à ces événements cli - matiques, qui ont anéanti près de la moitié de la ressource sur pied, le conseil régional d’Aquitaine et l’Inra s’associent pour mettre en œuvre une étude prospective. L’objectif est à la fois de venir en appui à la décision publique territoriale et de développer un questionnement de recherche sur les options d’adaptation d’une forêt au changement clima- tique 1 . Situé à la confluence de l’action publique et de la science, cet exercice traduit l’intérêt croissant porté à la prospective territoriale dans le sillage de l’affirmation des collectivités et de l’accentuation des risques et incer - titudes qui pèsent sur les territoires. Ces démarches pros- pectives visent en effet à mieux comprendre les transfor - mations de territoires définis par leurs interdépendances, à développer une culture d’anticipation et du débat col- lectif sur les enjeux futurs et à favoriser un apprentissage commun qui engage les acteurs locaux dans la définition de stratégies volontaristes (Durance et Cordobes, 2007). Les changements environnementaux (climat, biodiver - sité, énergie...) amplifient ce mouvement en démontrant l’aporie d’une anticipation uniquement fondée sur le prolongement de tendances passées (Mermet, 2005). Ils invitent à tenir compte des dynamiques territoriales et à rechercher des « signaux faibles », porteurs d’inflexion et d’innov ation. Mais ce recours accru à la prospective pose question. Comment ces démarches aident-elles à re-territoriali- ser des objets cadrés par des enjeux sectoriels tels que la forêt cultivée du MLG ? Quelles sont les voies et les impasses pour c heminer d’une logique prospective, qui explore une pluralité de futurs possibles, à une politique publique, tributaire de jeux d’alliances et orientée vers la résolution d’un problème ? Selon la théorie du changement politique proposée par Kingdon (2011) 2 , les effets de la prospective sur l’action publique peuvent s’envisager à deux niveaux : d’une part, sur la définition des problèmes mis à l’agenda, et d’autre part, sur la mise en œuvre de dispositifs d’ac- tion. En effet, la construction d’une politique publique traduit la convergence de ces différentes séquences – dénommées « problem stream » et « policy stream » – qui évoluent souvent de manière parallèle. À l’instar de nombreux travaux, cette approche relève l’importance E Les pratiques de prospective territoriale se développent dans le sillage de la montée en compétences des collectivités territoriales et de l’accentuation des incertitudes et des risques qui pèsent sur les territoires. Mais le passage d’une démarche prospective, qui explore une pluralité de possibles, à une politique publique, tributaire de jeux d’alliances temporaires et orientée vers la résolution d’un problème, n’est ni naturel, ni linéaire. À travers l'exercice de prospective conduit sur les landes de Gascogne, dont l'objectif était de venir en appui à l’action territoriale et de développer un questionnement de recherche sur les options d’adaptation d’une forêt au changement climatique, cet article nous montre comment la démarche a contribué à repenser collectivement ce territoire forestier et les enjeux de son devenir, et quelles stratégies d'actions elle a pu proposer. Il montre également les limites et les di f ficultés rencontrées pour traduire ces stratégies en dispositifs d'action.